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Recueil : Autre traduction : |
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auto-retrato com a musa
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autoportrait avec muse
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vejo-me ao espelho: a cara severa dos sessenta, alguns cabelos brancos, os óculos por vezes já mais embaciados. sobrancelhas espessas, nariz nem muito ou pouco, sinal na face esquerda, golpe breve no queixo (andanças da gilette). ia a passar fumando mais uma cigarrilha medindo em tempo e cinza coisas atrás de mim. que coisas? tantas coisas, palavras e objectos, sentimentos, paisagens. também pessoas, claro, e desfocagens, tudo o que assim se mistura e se entrevê no espelho, tingindo as suas águas de um dúbio maneirismo a que hoje cedo, e fico feito de tinta e feio. 2 quem amo o que é que pode fazer deste retrato? nem sabê-lo de cor, nem tê-lo encaixilhado, nem guardá-lo num livro, nem rasgá-lo ou queimá-lo, mas pode pôr-se ao lado e ter prazer ou pena por nos achar parecidos ou não achar. quem amo não fica desenhado, fica dentro de mim e é quando mais me apago e deixo de me ver e apenas me confundo, amador transformado na própria coisa amada por muito imaginar. assim nem john ashberry, nem o parmegianino, nem espelho convexo, nem mesmo auto-retrato. só uma sombra que é na sombra de quem amo provavelmente a minha. 3 quem amo tem cabelos castanhos e castanhos os olhos, o nariz direito, a boca doce. em mais ninguém conheço tal porte do pescoço nem tão esguias mãos com aro de safira, nem tanta luz tão húmida que sai do seu olhar, nem riso tão contente, contido e comovente, nem tão discretos gestos, nem corpo tão macio quem amo tem feições de uma beleza grave e música na alma flutua nas volutas de um madrigal antigo em ondas de ternura. é quando eu sinto a musa pousando no meu ombro sua cabeça, assim me enredo horas a fio e fico a magicar. |
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Vu dans le miroir : ma mine sévère des soixante ans, quelques cheveux blancs, parfois déjà des lunettes un peu plus brouillées. des sourcils épais, ni trop ni trop peu pour le nez une entaille sur la joue gauche, un coup bref sur le menton (errances d'un rasoir). Je passais par là, fumant cigarillo sur cigarillo mesurant le temps et la cendre des choses qui viendront après moi. Quelles choses ? Tant de choses, paroles et objets, sentiments, paysages. mais aussi des gens, bien sûr, et des choses floues, et tout ce qui se fond dans la masse et s'entrevoit dans le miroir, teintant ses eaux d'un maniérisme douteux, vue matinale me laissant ainsi fait d'encre et de laideur. 2 celle que j'aime que ferait-elle de ce portrait ? elle ne peut ni le connaître par cœur ni le mettre dans un cadre, ni le conserver dans un livre, ni le déchirer ou le brûler, mais elle peut le garder à ses côtés et prendre plaisir ou avoir pitié de nous trouver semblables ou dissemblables. Celle que j'aime n'est pas désignée, elle reste blottie en moi et je m'efface alors, et je cesse de me voir et je me confonds en elle, amant transformé en la chose aimée et pour beaucoup imaginée. ainsi non point john ashberry, ni le parmesan, ni miroir convexe, ni même autoportrait. seulement une ombre qui est dans l'ombre de celle que j'aime probablement la mienne. 3 celle que j'aime a les cheveux châtains et ses yeux sont noisette, le nez droit, sa bouche est douce et chez personne je ne connais un tel port de cou ni des mains si fines avec une bague en saphir ni lumière sortant de ses yeux si humide. ni un rire aussi heureux, touchant et contenu, ni des gestes aussi discrets ni un corps aussi doux, celle que j'aime a les façons d'une beauté grave et cette musique de l'âme qui flotte dans les volutes d'un ancien madrigal, en vagues de tendresse. alors je sens la muse qui vient reposer sa tête sur mon épaule, alors durant des heures le fil s'emmêle et je suis magique. |
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Pablo Picasso Le peintre et son modèle (1963) |
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