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Canção de amor escrita
sobre o mapa da América |
Chanson d'amour écrite sur la
carte de l'Amérique |
O mapa, o traço
cortando planícies, punas, os verdes, os vagos, a montanha. O mapa é superfície, não sangra, não é soco nem entranha. O mapa não tem botas, não tem locas, não tem bocas, não tem coxas. O mapa tem limites, trâmites, fronteiras, milícias, alfândegas. O mapa se conforma a ser janela, a ser mirante, a não ter ninguém errante. Não existe índio vago, mochileiro, viajante, gaúcho, cholo, baiano, só pontos no mapa. Onde os rios largos, o cristal, a neve, os peraus, o pó, as casas, as coxilhas, as facas, os tiros, os bichos, os nichos, os apetrechos, os calos, o sexo, a morena? O mapa se contenta com linhas retas! Onde o alimento no mapa, a saga, a bandeira, onde Sepé Tiarajú, onde Tupac Amaru? O mapa amordaça! Onde o canto, o samba, a diablada, o harawi mais terno? Ninguém canta no mapa? O embuste no mapa, o truste, o cartel, a multinacional, onde o povo no mapa? O gemido, a guerra, o passo, o laço, bocas rangendo, os seixos, notas, os dós, os dedos, a trança, o poncho, quem morre à míngua no mapa? Quem se acovarda? Quem se atreve? Quem se desloca? Quem se aborrece? Quem cruza fronteiras, cavalga, percorre trilhas, trilhos, estações, maldições, poções mágicas? Que coisas trágicas se desconhece nas cidades, nas malocas, nas bibocas, pontos na mapa? No entrevero de linhas coisas falsas coleiam, pervertem, coisas apodrecem? Quem se enternece a horas tantas da madrugada, quem lê um poema, quem adormece nos braços da mulher amada? Nos campos e matas quem luta e se mata? Dos camponeses, e dos barqueiros, e dos vaqueiros, e dos mateiros, o mapa não fala? Abro o mapa e canto de amor para América: e rio todos os risos e enrosco todos os cabelos e piso todos os passos e suo todos os poros e choro todos os olhos e corro todos os córregos e canto todos os pássaros e sonho todos os riscos e corto todos os veios e sangro todas as veias e durmo todos os corpos e desperto todas as injustiças e incendeio todos os seios e bebo todos os jarros e monto todos os cavalos e morro todas as mortes e sofro todas as sortes e alucino todos os sexos e abro todas as cadeias e voo todas as asas. |
La carte, le trait
coupant l'altiplano, les plaines, le vert, les vagues, la montagne. La carte est une surface exsangue sans obstacle ni entrée. La carte n'a pas de bords n'a pas de sites, n'a pas de bouches, n'a pas de bancs. La carte a des limites, des procédures, des frontières, des milices, des douanes. La carte normalise les points de vue et belvédères, afin que personne ne s'égare. Il n'existe pas d'Indien vagabond, routard voyageur, gaucho, métis, naturel de Baía sur la carte, rien que des points. Où, les grands fleuves le cristal, la neige les essarts, le gravier, les maisons, les collines, les couteaux, les fusils, les bêtes, les niches, les ustensiles, les callosités, le sexe. Où, ma brune ? La carte se contente Des lignes droites ! Où, la nourriture sur la carte, la saga le drapeau, où sont Sepé Tiarajú où, Tupac Amaru ? La carte est bâillonnée ! Où, le chant la samba, la diablada, le harawi le plus tendre ? Nul chant n'est sur la carte. L'artifice est sur la carte, le trust, le cartel, la multinationale, où, les peuples sur la carte ? La plainte, la guerre le pas, le piège, les bouches qui se tordent, les galets, les notes, le do, les doigts, la tresse, le poncho. Qui se meurt de misère sur la carte ? Qui se décourage ? Qui ose ? Qui bouge ? Qui s'ennuie ? Qui franchit les frontières chevauche, et parcourt les pistes, ornières, stations, malédictions, potions magiques ? Que de choses tragiques restent ainsi inconnues dans les villes les baraquements, les estaminets, sans points sur la carte ? Dans l'enchevêtrement des lignes, fausses, des choses collées se pervertissent, des choses pourrissent. Qui s'émeut Au heures tardives du petit matin qui lit un poème, qui s'endort dans les bras de la femme qu'il aime ? Dans les maquis et les champs Qui se bat et qui tue ? Et des paysans des bateliers des vachers des bûcherons, la carte n'en parlerait pas ? J'ouvre la carte et d'amour je chante mon Amérique et je ris avec tous les rires et j'emmêle tous les cheveux et je piétine dans tous les pas et je transpire par tous les pores et je pleure avec tous les yeux et je cours avec tous les ruisseaux et je chante avec tous les oiseaux et je rêve et je prends tous les risques et je me coupe toutes les veines et je saigne de toutes mes veines et je dors avec tous les corps et je me réveille de toutes les injustices et je mets le feu à tous les seins et je bois dans toutes les jarres et je monte sur tous les chevaux et je meurs avec tous les morts et je souffre de tous leurs destins et je fantasme sur tous les sexes et je me délivre de toutes les chaînes et je vole de toutes mes ailes |
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Alighiero Boetti La Carte d'Alighiero Boetti (1971-1973) |
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